Voilà quelques années que je lis et que j'apprécie Hauerwas. En particulier, Le Royaume de paix: Initiation à l'éthique chrétienne (Bayard, 2006; traduction de The Peaceable Kingdom, Notre Dame Press, 1983) m'a beaucoup influencé. Je vous recommande également The Stanley Hauerwas Reader (Duke University Press, 2001), ainsi que Living Gently in a Violent World: A Prophetic Witness to Weakness (IVP, 2008), le livre qu'il a co-écrit avec Jean Vanier, fondateur de l'Arche.

royaume de paix

Né au Texas en 1940, S. Hauerwas est très influencé par d'autres grands éthicistes tels Alasdair MacIntyre ou John Howard Yoder. Il détient aujourd'hui la chair d'éthique théologique à Duke University (Caroline du Nord). Hauerwas est un fervent pacifiste. Selon lui, "La non-violence n'est pas simplement une conséquence comportementale parmi d'autres qu'on peut déduire de l'Évangile: elle fait partie intégrante du corps des convictions chrétiennes" (Le Royaume de Paix, pp. 24-25). Mais attention, pour défendre cette position, Hauerwas surprend: "Si nous nous engageons vraiment en faveur d'un monde dans lequel nous sommes moins susceptibles de nous tuer les uns les autres, alors je pense que nous devons effectivement être très agressifs". En d'autres termes: les pacifistes, les vrais, sont toujours au coeur de la bataille, oeuvrant pour la paix et non pour la destruction de l'autre. Hauerwas se sait controversé, mais selon lui, c'est simplement parce qu'il demande aux chrétiens de pratiquer ce qu'ils prêchent.

Hauerwas Vanier

Revenons à la vidéo mentionnée ci-dessus. Hauerwas y explique qu'à travers des moments très difficiles, il a réalisé qu'il n'aurait pas survécu sans les prières d'intercession venant de ses amis. C'est parce que ses amis ont revendiquer que sa vie était importante pour leur propre vie qu'Hauerwas a pu devenir plus que ce qu'il aurait été sans eux: "l'amitié est une chose durable pour croître dans la vie de Christ".

Plus tard, quand on lui fait remarquer que les chrétiens aiment dire qu'il est important d'avoir une "relation personnelle avec Dieu (une forme d'amitié avec Dieu)" et qu'on lui demande s'il est utile de parler en ces termes, Haeurwas est clair comme de l'eau de roche: "Non, la dernière chose au monde que je veux est une relation personnelle avec Dieu. Notre relation à Dieu est possible grâce à une médiation: voilà pourquoi sans l'église nous ne connaissons pas Dieu. Pas d'Israël, pas de Jésus. Pas d'église, pas de Jésus. Notre foi est une foi médiate (indirecte), passant par un peuple formé par la Parole et les Sacrements. Je ne me pourrais jamais me faire confiance d'avoir une relation personnelle avec Dieu."

Bon, alors pourquoi avoir pleuré? Probablement parce que j'ai des amis qui ont aussi su prier pour moi quand j'en avais besoin. Je m'en souviens et leurs prières me sont toujours aussi chères. Mais c'est aussi parce que j'appartiens à une communauté (mon église) qui, formée par la Parole et les Sacrements, m'apprend à connaître Dieu toujours davantage. Quand je suis en compagnie de mes frères et soeurs dans l'église, je suis en compagnie de Christ, parce que l'église est son corps. Je connais Christ grâce à l'église. Et je remercie Hauerwas de me l'avoir si joliment, et originalement, rappelé.