John Stott : précurseur d’une éthique sociale évangélique

John Stott a cette capacité extraordinaire à intégrer éthique sociale et mission de l’église, sans pour autant minimiser ses convictions évangéliques. Très longtemps pasteur, théologien et auteur de douzaines de livres, il est notamment connu pour son leadership dans le premier congrès évangélique de Lausanne.

Au début de son ministère, les questions sociales ne furent pourtant pas sa priorité. Certains aiment à diviser ce ministère en deux parties : une piétiste puis une sociale. Selon John Stott, c’est la lecture, l’étude et la méditation de la Bible qui l’aidèrent à réaliser que Dieu ne s’intéressait pas seulement à la "religion", mais à toute la vie : "la justice comme la justification". Dans sa pensée comme dans sa vie, les sphères de la piété et de l’engagement social ne se contredisent en rien, même s’il croit en la spécialisation dans le ministère : lui-même se considérait comme pasteur avant d’être un activiste social.

Les chrétiens et l’engagement social

Dans son livre Le chrétien à l'aube du XXIe siècle, il écrit que l’évangélisation est un des instruments du changement social. L’évangile change des personnes, et les personnes ainsi changées transforment à leur tour la société. Mais pour lui, les chrétiens ne sont pas les seuls à avoir bénéficié, ni à avoir réformé la société. La moralité, comme la conscience sociale, ne sont pas limitées aux chrétiens ! D’ailleurs, force est de constater que l’église est souvent lente à rejoindre les mouvements de protestations sociales. Selon Stott, cela est dû à l’activisme essentiellement ecclésial des chrétiens et l’emphase évangélique sur la communion fraternelle : les chrétiens se concentrent parfois tellement sur les dangers de « l’attelage disparate avec les non-croyants » qu’ils oublient qu’ils peuvent aussi être « cobelligérants » avec eux, à la faveur du changement social.

Motivations théologiques

Mais quelle sont, pour lui, les justifications théologiques pour l’engagement social des chrétiens ? Cela commence avec la nature même de Dieu. Dieu s’intéresse non seulement à la religion, mais à toute sa création. Il aime la justice et se soucie de ceux qui sont oppressés. Or, si tel est le Dieu des chrétiens, ceux-ci ne doivent-ils pas chercher à lui ressembler ? Deuxièmement, puisque les êtres humains sont créés à l’image de Dieu, cela leur confère une dignité unique. Ce qui dévalue l’être humain doit les outrager, et les délivrer de tout ce qui les déshumanise doit les inspirer.

Un souci pour le tiers-monde

En 1981, John Stott écrivait qu’un des « angles morts » des chrétiens était l’oppression économique du Tiers Monde et la manière avec laquelle celle-ci semble tolérée. La pauvreté d’une grande partie de la population mondiale ne semble pas prendre une grande place dans la conscience évangélique. John Stott n’aura eu de cesse, à travers ses écrits et sa personnalité mobilisatrice, d’encourager ses lecteurs à ne plus tolérer cela.

Éléments biographiques

Né en 1921, John Stott est britannique. Depuis 1945, il a été pasteur puis recteur émérite de l’église All Souls Church à Londres. John Stott a joué un rôle majeur lors du congrès évangélique de Lausanne en 1974. En 1982, il a fondé « la Langham Partnership International » qui subventionne une partie des ouvrages vendus dans les pays du tiers-monde. Les fonds de Langham proviennent en grande partie des royalties perçus par John Stott sur la vente des 50 ouvrages dont il est l’auteur. Nommé en 2005 l'une des figures les plus influentes au monde par le magazine Time, John Stott vient de nous quitter à l'âge de 90 ans.

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Finalement, si la vie et l'oeuvre de John Stott vous intéressent, je note simplement, au delà de ses propres ouvrages, que son successeur à la Langham Partnership International, le théologien Christopher Wright a édité un livre intitutlé Portraits of a Radical Disciple: Recollections of John Stott's Life and Ministry, disponible chez IVP (en Anglais).